Coups de gueule

Lettre à France

17 janvier 2013
France

Chère France,

Je te dédie aujourd’hui ce billet qui se détache quelque peu de ma ligne éditoriale habituellement positivo-hédoniste. Je pense avoir besoin d’évacuer ce venin que je ne peux malheureusement pas disséminer dans les veines de cette sclérose que tu nommes URSSAF.
Depuis que je suis rentrée de Montréal pour vivre en tes contrées, je travaille en tant que freelance grâce à cette invention qui me semblait pourtant fort futée lors de sa création… l’auto-entrepreneuriat. Chaque mois depuis deux ans, je me livre à ce petit rituel de la déclaration en ligne et t’envoie une carte postale électronique chargée de mes cotisations les plus respectueuses.
Jusque là, nous nous entendions bien toutes les deux.

Bon, il y a bien eu ce petit incident de parcours lorsque nous avons enfin trouvé notre nid et que j’ai déménagé de chez ma maman, où je logeais depuis notre retour. Il faut dire qu’un changement d’adresse, même pour 800 mètres, ça a de quoi en décontenancer plus d’une. Je te comprends.
Aussi je te pardonne ce cafouillage qui, pour un déménagement dans le même arrondissement de la ville, t’a causé assez de tracas pour me créer un nouveau numéro de siret et me réclamer un double paiement de mes cotisations. N’en parlons plus, cette histoire fait partie du passé.

Mais alors que tu avais regagné ma confiance, tu n’as pas pu t’en empêcher… Il t’a fallu replonger ! Ce n’est pourtant pas faute d’avoir fait tous les meilleurs efforts du monde (oui, rien que ça) pour te faciliter la tâche.
À première vue, ton idée était plutôt bonne… T’accorder avec les grandes entreprises et administrations françaises pour qu’elles ne payent leurs prestataires qu’après que ceux-ci leur aient fourni une attestation en règle du paiement de leurs cotisations. Tu as raison ; par les temps qui courent, mieux vaut être prudente.
Il est donc tout naturel que le groupe de conseil en communication, pour lequel j’ai effectué des missions cet hiver, m’eut réclamé ce bout de papier.
Je ne remets pas en cause tes choix, mais tes actes.

Là où tu n’as pas joué franc jeu avec moi, c’est quand j’ai appelé la sclérose une première fois le 10 décembre.
– Madame, vous recevrez votre attestation par la poste, sous 5 jours.
Voilà qui me semblait bien correct. Avec le délai des 30 jours appliqué pour recevoir le paiement de ma facture, je serai confortable pour le lancement de la deuxième démarque soldesque.
Je t’ai crue. Mais à l’insu de mon plein gré, tu m’as menti.

Te trouvant des excuses – un oubli est si vite arrivé -, j’ai à nouveau joint l’URSSAF le 28 décembre.
Et là, tu as proféré un nouveau mensonge.

Mais, profondément attachée à toi, je t’ai offert une dernière chance début janvier. En jouant du violon et te précisant que je ne pourrai bientôt plus m’acquitter de mon loyer si les sclérosés ne m’envoyaient pas le dit papier, cette fois, tu as daigné m’écouter. Quelques heures ont passé et, dans ma boîte mail j’ai trouvé mes attestations tant attendues. Malheureusement, tes comparses avaient oublié d’y apposer leur entête alors la méchante comptabilité n’en a pas voulu.

C’est pour cela que je t’ai rappelée une 4e fois hier ; pas pour te harceler, je te le promets. Entre temps je te rappelle que les heures, les jours et les semaines filent et le paiement de ma facture avec eux. Vraiment hier, tu m’a laissée sur le popotin.
– Vous envoyer une attestation rapidement ? De toute façon, ici, rapidement ce n’est pas moins de 15 jours. Tout au mieux.
– Très bien mais comment je fais pour payer mes cotisations alors si vous ne voulez pas m’envoyer le papier qui me permet de moi-même me faire payer ?
– Et bien, vous n’avez qu’à venir dans nos locaux, à 2h de transport aller/retour de chez vous, auquel vous rajouterez le temps d’attente à l’accueil. Parce que, nous sommes bien d’accord, vous n’avez rien de mieux à faire.

Là, un lien s’est brisé entre nous.
À l’heure où tu liras ces lignes, France, je serai donc passée du côté obscur de la sclérose ; pour une chasse au trésor où le gros lot est un papier que TOI, tu réclames, mais que tu n’es pas capable de me fournir.
Je te rassure, j’ai la chance d’avoir quelques sous de côté et d’être épaulée par un homme formidable qui me soutient. Mais comment font les gens qui n’ont pas cette chance ? Hein, France ! Toi qui te plaint de voir les chiffres du chômage grimper de mois en mois, arrête donc de tout mettre en œuvre pour les faire gonfler encore plus !

Alors oui chère France, ta culture et ton art de vivre me manqueront quand je serai installée de l’autre côté de l’Atlantique. Mais ta sclérose administrative, et tant qu’on y est ces nécroses qui n’ont rien d’autre à faire que de défiler contre la liberté, je peux te dire que, ces choses là, je ne les pleurerai pas.

À bon entendeur, bye !

Edit : demain, le blog reprendra une activité normale avec du miam et une bonne adresse parisienne au programme.

Crédits photo d’entête : We♥it

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29 commentaires

  • Répondre Xel0u le l0up 17 janvier 2013 at 8 h 46 min

    Ca me fait penser au RSI ce truc… Ma patronne essaye de les joindre au moins une fois par semaine (encore que ça s’est calmé)… De toute façon c’est bien connu que l’administration française est une plaie… Et je crois que le pire, c’est qu’on essaye de te faire croire que c’est toi qui a tort, alors que c’est leur truc qui ne tourne pas rond.

    Mince, je me suis emportée 😀
    Bonne journée à toi !

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 47 min

      C’est surtout pour cela que la haine m’a gagnée. On m’a traitée comme si j’étais fautive ou que je les dérangeais au cours de leurs voeux de nouvelle année. Bref, maintenant c’est du passé. Tournons la page jusqu’à la prochaine mésaventure ! ^^

  • Répondre lorette 17 janvier 2013 at 9 h 00 min

    Les joies et les plaisirs de l’entrepreneuriat en France… Je pourrais en faire un roman !
    Quand je pense à tous ces salariés qui pensent que tous les entrepreneurs ne sont que des gens qui pensent qu’à s’enrichir sur le dos des gentils salariés, alors que pour 98% d’entre nous, nous ne sommes que des gens qui veulent simplement se sortir les doigts du c.. et gagner un minimum leur vie en créant leur propre activité et, parfois, en créant même de l’emploi..
    Ton message me touche particulièrement et je comprends mille fois ton énervement. Le RSI est l’une des administrations qui parle un peu comme dans ton billet 🙂
    C’est dans ces moments-là où, oui, tu rêve finalement d’être un gentil salarié 🙂
    P.S : je précise que je n’ai rien contre les salariés, juste contre ceux qui nous jugent mal…
    Mais j’ai peut être dérivé de ton sujet premier.
    Toutes mes pensées vont vers toi, chère entrepreneure, tiens le coup !

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 49 min

      Ah je n’ai pas encore eu la malchance de tâter du RSI, mais je vois qu’il revient souvent ce petit galopin !
      Merci ma Lorette pour tes encouragements !!

  • Répondre Corinne (Couleur Café) 17 janvier 2013 at 9 h 03 min

    L’appelation sclerose est justifiée ! C’est pénible !!!!

  • Répondre Cynthia 17 janvier 2013 at 11 h 17 min

    Aïlle!

    Chez nous tu n’auras pas ces tracasseries mais en contrepartie les travailleurs autonomes n’ont pas beaucoup de protection sociale.

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 46 min

      Ouiiii, un ami a monté sa boîte au Québec. En 3 petits jours, c’était réglé !
      Enfin, comme tu le dis, je me console avec mes droits à la sécu (même si les avantages sociaux des auto-entrepreneurs n’équivalent en rien celui des salariés) ! :p

  • Répondre FloFlaix 17 janvier 2013 at 12 h 09 min

    Ah, ma chère, quelle joie de lire ce résumé (j’avoue, ton homme formidable m’en a parlé, je me suis donc jetée dessus dès que j’ai pu).
    C’est juste parfait. Totalement fidèle à la réalité. J’imagine un petit insecte qui se bat pour essayer de sortir du bocal, et qui, dès qu’il arrive près du bord, se fait secouer pour retomber au fond comme une vieille frite.
    Tu as vu que de mon côté j’ai aussi tout essayé pour faire plier le « groupe de conseil en communication », mais la sclérose est plus forte que tout. Elle est le dernier rempart. Le tout puissant. Il faut dire que tu n’as pas mis les chances de ton côté… inclure dans cette période la fameuse « période des fêtes ». Quelle folie !!! Au mieux la personne en charge de ton dossier est partie 3 semaines en vacances (il faut bien les écouler, les 11 semaines de vacances), au pire, ils ont perdu la demande. Ou elle est sous une pile de boites de « Mon Chéri » et de « Pyrénéens » vides…
    Courage. Nous vaincrons, à la fin… on y est presque !

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 43 min

      Merci Flo ! Dans cette histoire, tu as été le petit rayon de soleil m’épaulant dans le brouillard de l’incompétence. 🙂
      Et comme tu le dis si bien, Noël n’a pas dû jouer en ma faveur. Alors note pour moi-même… éviter de contacter la sclérose en fin d’année, pendant la saison de ski, à Pâques, durant les ponts de mai, l’été et particulièrement autour du 15 août, la rentrée des classes parce que c’est stressant, puis la Toussaint parce que c’est déprimant !!

  • Répondre SoOhCliché 17 janvier 2013 at 12 h 17 min

    Que je suis désolée de lire tous ces tracas… Même si c’est peu de choses je t’envoie tout plein de bonnes ondes pour que ce ne soit bientôt plus qu’un mauvais et lointain souvenir (lointain est à prendre au sens propre du terme dans ton cas ^^). En tout cas, les administrations françaises sont consternantes, ça c’est certain. J’ai eu des histoires de sécurité sociale en changeant de mutuelle au sortir de ma vie d’étudiante, je suis tombée dans les limbes de la sécu, je n’existais plus, j’ai du prouver ma nationalité, un vrai parcours du combattant pour moi qui ai toujours vécu en France, soignée en France. Un comble. Bref, ça me paraissait aberrant. Et surtout, évidemment, sinon c’est pas poilant, on te parle comme à une malpropre, qui essaye forcément de louvoyer. Ô oui, c’est tout moi ! Il y a quelques semaines, c’était les impôts pour une histoire de dossier qui ne leur a pas été transmis depuis mon ancien centre suite à un déménagement vieux de… 2 ans. Bonheur. Bref, loin de moi l’idée de venir me plaindre ici ou de comparer, mais la galère est commune ça c’est sûr. Haut les coeurs et vivement tes prochains articles doudoux 🙂

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 39 min

      Ton expérience ne m’étonne pas ; ça a été la même pour nous au retour de Montréal. J’avais droit à la sécu et, va savoir pourquoi, l’Homme non. Normal ! Mais de là à aller jusqu’à te faire prouver ta nationalité, bonjour les sous-entendus !
      En tout cas, tes ondes positives m’ont accompagnées. J’ai pris mon venin à deux mains, le métro, le bus et le tram et leur ai rendu visite sur leur terrain. Une demi-heure d’attente et c’était réglé. Et, je tiens à le dire, auprès d’une personne très compétente. Je pense qu’ils gardent les pires pour le standard téléphonique ! Allez, je viens de recevoir une commande soldesque de chez Oysho ; les articles doudoux ne sont pas loin ! 🙂

  • Répondre olivia 17 janvier 2013 at 15 h 59 min

    ça fait du bien un bon coup de gueule parfois !!! J’espère que tout se régleras le mieux possible pour toi ! C’est vrai que les choses sont bien mal faites…
    Courage c’est bientôt fini <3

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 35 min

      Ouiiii, c’est toujours mieux qu’une longue et coûteuse thérapie ! 😉

  • Répondre La Grenadine 17 janvier 2013 at 17 h 18 min

    Depuis le 10 décembre ? o-o
    Ils abusent quand même !
    Et puis le coup du doublement de la cotisation parce que cafouillage dû au déménagement, tu as pu te faire rembourser j’espère ?

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 33 min

      Je pense qu’ils essaient de battre un record à l’interne ! :p
      Pour le doublement de la cotisation, je n’ai pas payé ; je les ai harcelés au téléphone. Chance pour moi, ce n’était pas l’époque de Noël et ils devaient avoir un regain de motivation. Ça avait été réglé relativement vite.

  • Répondre letizia 17 janvier 2013 at 21 h 29 min

    c’est pas pour rien que je suis partie en espagne. Le mot est bien trouvé, c’est une « sclérose »!

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 34 min

      C’est tellement décevant je trouve. Peut-être qu’un jour ils daigneront ouvrir les yeux !

  • Répondre Nathalie, lheuredete 18 janvier 2013 at 9 h 05 min

    Brrr…. entre ta galère et celle que je lis de SoOhCliché, je frémis. Cela en deviens kafkaïen.
    J’espère que tout va s’arranger au plus vite. Bon courage !

    • Répondre Anne-Laure 18 janvier 2013 at 9 h 35 min

      Merci pour tes encouragements. La situation s’est débloquée ; j’ai fini par passer directement dans leurs bureaux hier. J’ai perdu 1/2 journée de mon temps mais certainement gagné des jours voire des semaines de bataille ! 🙂

  • Répondre Poleen 18 janvier 2013 at 10 h 15 min

    Oh comme cela me rappelle de (très) mauvais souvenirs ! Chez moi des histoires de CAF et Sécu surtout …
    Je t’admire d’avoir su garder ton calme et avoir pu finalement régler la situation !
    Quelle tristesse tout de même …
    Grosses bises !

    • Répondre Anne-Laure 22 janvier 2013 at 10 h 08 min

      S j’avais su dès le début combien ça irait plus vite en me déplaçant, je me serais précipitée chez eux ! Je le saurais pour la prochaine fois (oh non pitié !!!) ; au moins c’est réglé ! Et ça m’a apporté un peu de réconfort de voir que plus ou moins tout le monde a déjà vécu ce genre de déboires. 🙂

  • Répondre Faust'in 18 janvier 2013 at 11 h 25 min

    Tu fais bien de partir, je n’ai qu’une hâte, te suivre avec ma petite famille … (Bon, peut être pas au Canada, mais bon ^^).

    • Répondre Anne-Laure 22 janvier 2013 at 10 h 09 min

      Mais si le Québec, c’est le nouveau monde. Ta petite loute pourra jouer dans la neige tous les hivers ! :p

  • Répondre Laurelas 19 janvier 2013 at 14 h 17 min

    Rien que le mot « administration française » me fait grincer les dents et frémir, rien de pire je crois. Et perso, ça a toujours été avec le CROUS aussi. Bon. Je croise les doigts pour ne plus être confrontée à ce genre de choses. (Fol espoir?)

    • Répondre Anne-Laure 22 janvier 2013 at 10 h 09 min

      Je croise les doigts ET les orteils avec toi ! 🙂

  • Répondre July 21 janvier 2013 at 21 h 50 min

    Quelle horreur! Peu de choses me donnent honte d’être française, je suis plutôt fière, mais cet exemple est une des raisons pour lesquelles je pourrais avoir intimement honte… J’espère que tu vas te sortir de ce pétrin ma belle! Take care!

    • Répondre Anne-Laure 21 janvier 2013 at 22 h 50 min

      Merci pour tes encouragements ma jolie July. Depuis, la situation s’est réglée (j’ai pris mes petites jambes et suis allée embêter l’URSSAF, chez eux !). Je n’ai plus qu’à attendre d’être payée maintenant ! 🙂

  • Répondre Charlotte 29 janvier 2013 at 14 h 02 min

    Comme je te comprend ! Je suis moi aussi auto-entrepreneur, et quand j’ai déménagé (et changé de département) la galère a commencé pour faire prendre en compte ce changement d’adresse. De longs mois et une dizaine de coups de fil de ma part ont été nécessaires pour que mon statut rentre dans l’ordre, mais du coup j’ai du payer beaucoup de cotisations en retard d’un seul coup (et avec majoration sinon c’est pas drôle). Ce qui m’a le plus décontenançée dans cette histoire c’est que tous les interlocuteurs que j’ai pu avoir au téléphone avaient tous un son de cloche différent sur la démarche à suivre (il y en a même un qui m’a tout simplement dit qu’il ne savait pas comment faire pour que ma nouvelle adresse soit prise en compte, sans chercher plus loin). Entre ça et ton histoire de certificat sans entête, des fois on se demande ce qu’ils font de leurs journées ^^.

  • Répondre Rue Rivard » Blog Archive » Freelance un jour, freelance toujours ? 21 octobre 2014 at 20 h 53 min

    […] raison. Après m’avoir fait craquer il y a 1 an et demi (souvenez-vous, je me lâchais entre ces pages), l’URSSAF a récidivé cette année en fermant mon statut d’auto-entrepreneur, comme […]

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